Miaou miaouuu miaouuuuuuu…

— À l’aide, au secours. Pitié, aidez-moi. Il y a comme une odeur de sang dans mon appartement. Ne me laissez pas ainsi toute seule. Au secourrrrrrrs !!!

Je hurlai à m’époumoner, penchée à ma fenêtre, du haut du dixième étage.

Le spectacle valait le coup d’œil : une folle ameutait la population entière.

Enfin pas si folle que ça vu qu’elle venait de découvrir un corps, assassiné certainement, dans le coin de son living.

Elle avait suivi l’odeur et avait trouvé le fameux corps,

Il y avait de quoi s’énerver non ?

Je n’en menais pas large, tellement j’étais paniquée de ce que je venais de trouver sous mes yeux en rentrant.

Mais qui allait m’entendre de là-haut ? Je beuglais du poulailler, juste sous le ciel.

Personne n’avait réagi : c’était sans doute logique, vu l’heure nocturne. Pas un passant sur le boulevard.

Je songeai un instant à appeler les forces de l’ordre, mais non, je me rétractai, en y réfléchissant bien.

Ils ne me prendraient pas au sérieux.

J’imaginais déjà le scénario : les pompiers, le service médical d’urgence, la police…

Ça risquerait d’ameuter tout le quartier.

Et puis les déranger pour ça…

J’aurais dû passer un alcotest ou ils m’auraient envoyée en hôpital psychiatrique pour me faire soigner.

On peut paniquer devant un cadavre certes, mais il y a des limites à ne pas dépasser comme par exemple faire du tapage nocturne et réveiller une ville qui dort paisiblement.

Je me revoyais rentrer dans mon logement ce soir.

Je revenais d’une fiesta bien arrosée et je me sentais un peu groggy, dans le gaz quoi…

Oui, j’avais pas mal picolé ce soir en écumant tous les bars pour enterrer ma solitude.

Pour être imbibée, je l’étais. Pire qu’une éponge !

Donc, je revins, en titubant légèrement, vers mon fameux cadavre.

Je m’accrochai aux fauteuils pour ne pas tomber.

Je ne savais pas si les vertiges en question étaient dus à l’excès d’alcool ou au corps que je venais de découvrir.

Il gisait dans un coin, inerte, mort de chez mort.

Un cadavre plus vrai que nature !

Non mais, venir mourir chez moi, en se faisant assassiner, il fallait le faire !

J’avais éprouvé un moment de recul quand je l’aperçus, car le spectacle n’était vraiment pas joli à voir.

Je ne savais plus si j’avais envie de vomir devant un tel tableau macabre ou si je devais courir aux toilettes pour rendre tout mon repas.

Mon souper ou plutôt les mélanges que j’avais ingurgités, qui remontaient directement par la même voie par laquelle ils étaient descendus.

J’étais statufiée en fait, comme figée, les jambes tremblotant de partout et personne à mes côtés pour me soutenir.

Je me rappelai que la première chose que j’avais commise, c’était d’aller vérifier dans les autres pièces s’il n’y avait pas un de ses copains restés planqués quelque part.

On ne sait jamais : dans des cas pareils, il est utile de prendre toutes les précautions…

— Miaou miaouuu miaouuuuuuu…

— Ah te voilà, toi, ma chérie ? Écoute ce n’est guère le moment de me demander de te donner à manger. Et puis, je remarque que tu n’as pas terminé ton repas.

A ce que je vois, tu n’as pas trouvé le menu à ton goût !

Mais oui, ma chérie, tu es gentille tout plein. Mais oui, je t’adore…

Tu es la plus belle…

Je la caressai machinalement, du bout de la paume de ma main.

Un rire nerveux me prit d’un coup mais comme je le dis, c’était un rire nerveux.

Un rire qui surgit inopinément, droit du fond du ventre et qui ne vous lâche plus.

Le dernier rire que j’avais exprimé de la sorte, c’était à un enterrement, en suivant le corbillard qui menait au cimetière.

J’avais onze ans et on enterrait ma grand-mère et pourtant, en plein trajet entre la maison et la crypte, j’ai pété de rire à ne plus pouvoir m’arrêter.

Les gens m’avaient regardée de travers, horrifiés par mon attitude déplacée.

Mais les rires nerveux, ça ne prévient pas, n’est-ce pas.

Ça arrive quand on s’y attend le moins et toujours dans des situations indélicates.

Je mis cinq bonnes minutes à récupérer mes esprits, mais ce fou rire m’avait fait grand bien.

Je préférai commencer mon inspection, en débutant par notre chambre.

J’inspectai minutieusement chaque coin, chaque centimètre carré.

J’ouvris les placards, déplaçai les couvertures, les coussins…

Malgré mes douleurs dorsales – depuis quelques années, mes lombaires me font souffrir – je me penchai sous le lit – on ne sait jamais qu’il ou elle se serait planqué en-dessous, mais rien.

Pas la moindre trace de vie à l’horizon.

Pas le moindre bruit ou crissement non plus.

Je continuai par la seconde chambre en suivant le même rituel d’inspection.

Je remarquai en passant que ma fille n’avait pas rangé ses affaires et qu’il y régnait un désordre qu’elle considérait elle seule comme organisé mais ça ressemblait à un fouillis innommable.

Mais il ne faut jamais contrarier une adolescente dans l’aménagement de son univers.

La chambre d’une ado, c’est propriété privée, et si elle savait d’ailleurs que j’y rentrais, je risquerais de passer un sale quart d’heure.

Je remarquai cependant des emballages de nourriture vides, des morceaux de biscuits séchés.

Grrr !!! Je lui avais pourtant signifié qu’il était strictement défendu de manger dans sa chambre et surtout, au cas où elle enfreindrait cette consigne, d’aller jeter les déchets dans la poubelle de la cuisine.

C’est comme ça qu’on en arrive à attraper des occupants nuisibles,

Et je déteste ce genre de rongeurs !

Ça court partout, ça ronge, ça se multiplie à une vitesse grand V.

Le couloir était dans l’obscurité totale et Minette en profita à ce moment-là pour se faufiler entre mes jambes.

Je sursautai comme une pile électrique en sentant sa fourrure me caresser les membres inférieurs.

Sacrée Minette tout de même et que ferais-je sans elle ?

C’est ma compagnie de chaque jour, chaque moment…

Ce n’est pas vraiment un chien de garde vu que c’est un chat, mais ça reste une présence tout de même et elle arrive, avec ces petits moyens, à se débarrasser d’intrus éventuels.

Je passai à la cuisine et là, ce fut l’horreur : la poubelle était renversée par terre, éventrée de toutes part.

Mais que s’est-il passé ici en mon absence ?

Je pris donc mon courage à deux mains pour tout ramasser, et à l’aide d’un nouveau sac poubelle, je remis le tout proprement si l’on peut dire.

Mais l’odeur pestilentielle des carcasses de crevettes mêlées aux épluchures de pommes de terre, aux peaux de banane m’écœura encore un peu plus.

Une senteur de mélange qui avait macéré dans son jus…

Ça m’apprendra à ne pas descendre la poubelle régulièrement.

Bon, je n’avais rien découvert de suspect dans mes pièces de vie et je me retrouvai seule, avec ma chatte et le cadavre dans le coin du living.

Je me dis que c’était un peu stupide de ma part de crier à tout va de mon balcon, de tenter d’ameuter la ville pour si peu de chose.

Ce n’était au final qu’une simple souris morte, éventrée, que Minette avait abandonnée, après avoir joué avec et l’avoir tuée, baignant dans son sang, inerte mais bien morte.

Je pris mon courage à deux mains, j’enfilai une paire de gants en plastique jetables et ramassai la pauvre bête assassinée et martyre pour l’ajouter aux ordures du sac poubelle que je devais de toute façon éjecter de l’appartement.

Je ficelai le plastique et le descendis dans le local à ordures.

J’espérais simplement qu’elle n’était que le seul rongeur locataire indésirable.

Je me servis un dernier verre – tant qu’on y était, un de plus ou pas, ça n’aurait rien changé et il fallait bien que je me remette de mes émotions.

Sacrée souris, quelle idée de venir se faire assassiner dans un appartement vide, avec pour seul gardienne, une chatte qui avait très très faim !!! Finalement, avec elle, je fais des économies…

TANKAS sur la lune

Dans son doux reflet
Dans son doux reflet
deux ombres pâles miroitent
le jour endormi
un amour scellé murmure
soupir levant de l’aurore

Elle brille pleine
Elle brille pleine
premier ou dernier croissant
ou toute nouvelle
la plume sous le halo
tracera ton mot d’amour

Au petit matin
Au petit matin
l’aurore se pointe enfin
charme du jour neuf
nos corps enlacés dessinent
l’astre effacé par le temps

Ronde et féminine
Ronde et féminine
elle inspire nos amours
source créatrice
les genèses se romancent
un chérubin chimérique

Halo lumineux
Halo lumineux
ensevelissant le jour
nuage le temps
ma plume guide mes mots
j’attends doucement l’aurore

Sakuras en fleur
Sakuras en fleur
un reflet rosé nocturne
mes rêves en pleurs
la nuit lessive mes larmes
sous l’astre mes peurs s’en vont

Sombre dans la nuit
Sombre dans la nuit
elle soutient les pensées
des humains perdus
mais elle luit pour nos âmes
elle est le yin et le yang

Manger un croissant
Manger un croissant
recouvert de mille étoiles
sucrant mon matin
la nuit a pris sa valise
laissant l’astre édulcoré

Maître des marées
Maître des marées
Je lui retire ses vagues
ça va puis ça vient
je lui prends également
son pouvoir ensorcelant

Au vent printanier
Au vent printanier
partout le pollen s’envole
atchoum j’éternue
la poussière d’or se colle
et grignote ma cervelle

Pleure ma mémoire
Pleure ma mémoire
le croissant me la grignote
doucement, gourmand
je voudrais tant t’effacer
toi mon dernier souvenir

Sous l’astre qui luit
Sous l’astre qui luit
l’histoire s’est endormie
plus aucun écho
au petit matin les piafs
chantent la nuit disparue

Je ne t’aimerai jamais…

Toi mon unique amour, mon cher et tendre cœur
Toi le fil de mes jours, ma seule raison d’être
Toi qui guéris mes bleus par tes soins de bien-être
Tu brodes sur mes nuits des perles de bonheur

Toi qui supportes tant mes changements d’humeur
Toi le méditatif qui ne dis que peut-être
Toi le méticuleux qui prends tout à la lettre
Tu me chéris pourtant, sans angoisse ni peur

Je le sais, au début, j’étais comme une amie
Moi ton petit bébé, moi ta grosse chipie
Te menant dedans et là par le bout du nez

Je serai néanmoins le guide de ta vie
Ensemble, nous mourrons mais j’en serai ravie
Et je ne t’aimerai jamais…Jamais assez !

🎂🥂🎂 BON ANNIVERSAIRE MON AMOUR 🎂🥂🎂

Barbarie en brasserie

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Barbarie en brasserie (sonnet estrambot)

C’est un caneton qui barbote dans sa mare

Ne sachant pas nager, il flotte comme un grand

Dans son bec: quelques vers, repas exquis si rare

Torture de l’esprit: les manger oui mais quand ?

Il tourne, tourne en rond, lui le canard barbare

Que faire de ce mets dont il est si friand

Le cacher quelque part, il cherche, s’y prépare

Ces vers sont trop tentants, il est plutôt gourmand

Plus le temps passe, plus ça devient un supplice

Les manger sur le champ, au diable l’avarice ?

Il ne tient plus en place, engloutissant le tout

Cet oiseau capturé part avec ses entrailles

Le corps saucissonné, le gésier en margailles

Du côté des fourneaux du bistrot « Mangetout »

Si vous choisissez du canard de Barbarie,

A déguster un jour dans une brasserie

Pensez à ce qui s’y cuisait dans le faitout!

Le chat et le mainate (sextine)


Un félin très gourmand, tout simplement un chat,
Vivait depuis longtemps avec un vieux mainate.
Il se croyait bien seul au monde, ce goujat !
Vraiment pas de raison d’en faire tout un plat…
Il restait dans son coin, quand arriva la date,
Épouvantable jour pour que la paix éclate.

Il dresse un bilan: le cataclysme éclate
Il a beau proclamer qu’il n’est qu’un bête chat.
Sur son calendrier il a vu cette date,
Il lui casse les pieds, cet intru de mainate
Locataire niais glanant dans chaque plat,
Qui va le désigner de satané goujat.

« Tu n’es qu’un sot et un sale petit goujat »
Vlan la discussion commence puis éclate.
Le matou ne dit rien, le regard sur son plat.
Il ne réagit pas, cela reste un chat !
Diable qu’il est bavard cet atroce mainate,
Il ne pouvait bien mal d’escamoter la date.

De quel jour s’agit-il , quelle est donc cette date ?
Ce béo fait fort en le traitant de goujat.
« Il me reproche quoi, ce satané mainate ?
Mon narcissisme feint pour que la guerre éclate…
Ce n’est guère important, foi de Prince le Chat,
On peut être pervers sans qu’on en fasse un plat.

A propos de festin, il a piqué mon plat.
Il mange mon repas, fêtant tout seul sa date.
Pour qui donc me prend-il, moi un si gentil chat ?
Rien à faire c’est lui l’invétéré goujat.
Dévorant mon dîner, ce perroquet s’éclate;
Il m’énerve en effet cet horrible mainate »

« Faisons enfin la paix » lui lance le mainate,
«  Bien trop de nourriture en ton sinistre plat.
Quand j’y pose le bec, le différend éclate,
Ce n’est pas le récit d’une modeste date.
Reste que tu te sers comme un sale goujat.
Que veux-tu cher ami, bien sûr tu n’es qu’un chat ! »

TORNADA

Le chat devient copain avec ce cher mainate.
Goujat certes il fut, tout cela pour un plat.
Date d’un départ où cet ancien temps s’éclate…

Un poème ardu à créer car il n’y a que 6 rimes (3 féminines et 3 masculines) qui se répètent de 6 en 6 dans un ordre précis
La fin, la Tornada (le tercet) doit reprendre les 6 rimes dans un ordre aussi particulier (2 par vers) et les premières rimes du vers ne doivent pas tomber à la césure à l’hémistiche.
Le tout évidemment en alexandrins (avec les règles d’usage)!

Bon, je m’en vais prendre une boite de cachets d’aspirine lol !!!